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La Lettre de Refus

La Lettre de Refus
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21 mars 2006

Introduction

Autant être clair dès le début. L’objet de ce blog ne relève pas d’une tentative désespérée et grotesque de forcer la publication d’un texte (CORPUS - 230 pages) dont personne ne semble vouloir, ni de donner des conseils définitifs au peuple des romanciers de tiroir et encore moins de tirer à boulets rouges sur certains immeubles du 6ème arrondissement (cependant, moyennant finances, je peux livrer sous pli discret à qui le souhaite une carte d’Etat Major de l’arrondissement susnommé dûment annoté, complété de la liste des digicodes des portes cochères de chaque éditeur, et des prénoms de leurs maîtresses). J’espère que cette monographie commentée de la lettre de refus sera au monde de l’édition ce que le string est aux fesses de mme Thatcher: un cache-misère.

Qu’est-ce qu’une lettre de refus ? Vaste question. Nulle part, vous ne verrez écrit le terme de refus sur cette fameuse lettre qui ne dit pas son nom (la coquine !). En effet, contrairement aux lettres administratives, dont elle emprunte souvent le ton, elle n’a pas d’objet. L’éditeur, pudique, délicat, je m’en-foutiste, s’embarrasse, dans une courte volée de lignes, de quelques formules dont l’enjeu est de remercier, présenter ses condoléances et réclamer une somme forfaire pour le retour en vos quartiers de votre encombrant manuscrit. La lettre de refus est avant toute chose une énorme déception dont on ne peut cependant pas se passer car faire le pied de grue devant sa boîte aux lettres devient vite une sale dope pour les auteurs de tiroir super-stressés. Déceptions, donc. Et trois fois plus qu’une. D’abord on vous dit non. Ensuite, on vous le dit de manière banale. Enfin, on ne vous donne pas d’explication.
Force est de constater (je n’aime pas cette expression et je ne comprends toujours pas ma manie masochiste de lui faire prendre de temps en temps l’air au milieu d’un paragraphe qui pouvait parfaitement s’en passer) que le déséquilibre règne en maître. D’un côté, écrasant et majoritaire, les rangs d’oignons d’auteurs de tiroirs, moribonds, refusés d’office, nerveux, dépressifs, maniaques de l’adjectif à rallonge et grands consommateurs d’adverbes ; de l’autre la profession, impassible et dédaigneuse (j’exagère, je sais, mais c’est très bon d’exagérer quand on est encouragé par les ricanements entendus des refusés). L’éditeur est débordé, submergé, asphyxié (500 manuscrits par mois chez Actes Sud). Chaque matin, la poste déverse ces tombereaux de manuscrits. Que peut-il faire ? Répondre coup pour coup. Un manuscrit ? Hop !, une lettre type de refus ! On m’accusera d’exagérer (voir supra) ? Qu’on lise la prose des éditeurs pour se faire une juste idée.

Pas d’amertume sur ce blog en forme de Guide Michelin des établissements les plus courus. Seulement une légitime requête, celle de voir joindre un geste à une parole. Si les comités de lecture font réellement leur travail, qu’ils nous (me) fassent parvenir les mythologiques fiches de lecture justifiant leurs refus. Combien de temps faut-il pour écrire une histoire ? Combien de temps faut-il pour plier et timbrer une lettre de refus ? Je milite donc pour la fiche de lecture jointe à toutes les lettres de refus commençant par l’expression « après une lecture attentive de votre texte par notre comité… ».


Jadis (il y a trois ans), j’ai composé à quatre mains (les 2 mains présentement sur mon clavier et celles d’un ami journaliste) un polar loufoque (mais drôle) qui a essuyé, lui aussi, des réactions de légitime défense d'y revenir. Grâce à un appui indirect (on rêve, mais c'est la vérité !), nous avons pu mettre la main sur une fiche de lecture de Fleuve Noir. Vous en trouverez un fac-simile en bas de page.
On se demandera, finalement, s’il ne vaut pas mieux rester ignorant du pourquoi et du comment…

En consultant les lettres de refus d’une vingtaine d’éditeurs (publication des lettres de refus au fur et à mesure de leur arrivée dans ma sainte boîte aux lettres) auxquels fut soumis le manuscrit CORPUS, vous entrez sous les jupes de la République des Lettres. Amis romanciers de tiroir, restons dignes.

Mr. F.

De l’auteur, vous retiendrez :

- J’ai 35 ans et je suis un auteur de tiroir.

Moins on en dit, mieux on se porte (extrait de « Pensées secrètes de Jacques Chirac »)

Conseil : ne suivez pas mon exemple (il ne peut que vous desservir), j’ai certainement eu tort de joindre un résumé de deux pages au manuscrit CORPUS (mais quel con !!!). Une enveloppe, un manuscrit et trois gouttes d'eau bénite.

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Fiche de lecture de Fleuve Noir pour le roman de tiroir Requiem Agricole

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21 mars 2006

Corpus : 230 pages. Voici les trois premières. D

Corpus : 230 pages. Voici les trois premières.

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Vision liminaire au dernier jour

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’abord, il y a Jacques Bartel. Il est assis en face d’un homme et il dit : « si j’avais pu me détacher…»

Il n’achève pas sa phrase. Il se laisse aller à rêver de ce qu’auraient pu être les choses dans un contexte différent. Ces mots de choses et de contexte ainsi que le verbe détacher, qui ponctue sa phrase, sont des indices sur sa psychologie. Il s’agit de considérer Jacques Bartel en termes de fatigue et d’égarement. Il dort très mal et très peu. Si la pensée était organisée comme la parole — ce qui n’est jamais le cas — depuis un moment, à cause de coïncidences et de circonstances particulières, le conditionnel aurait pris dans le cerveau de Jacques Bartel la place de tous les autres temps de conjugaison.

L’autre homme s’appelle J.M. Pinas. Il est trop tôt pour parler de son métier et de son rôle. Contentons-nous de le voir comme celui qui est derrière un bureau surchargé et qui écoute attentivement. Ils se disent vous. Penser qu’ils ne se connaissent pas est faux. J.M. Pinas connaît Bartel de réputation.

Jacques Bartel est donc celui qui parle. De temps en temps, J.M. Pinas posera poliment quelques questions ou réclamera des précisions. Il est environ dix-neuf heures. Jacques Bartel va s’expliquer trois heures durant. Quand il s’en ira, il fera presque nuit, nous serons dans le centre ville de Nice en 2005 et ce sera l’été.

Jacques Bartel pourrait avoir cinquante-cinq ans. Il serait bel homme, grand, mince, hâlé s’il n’était pas si fatigué, son œil est bleu-gris et ses mains sont longues et fines. Il pourrait aussi être très différent. Peu importe. On convient qu’il est séduisant et qu’il prend soin de son corps. L’aspect physique de J.M. Pinas n’a aucune importance. C’est un homme d’expérience, ouvert, franc et logique. Nous ferons en sorte de le placer dans la peau de quelqu’un de qui l’on peut dire qu’il a le commerce agréable. J.M. Pinas souffre de tics qui s’accentueront au fur et à mesure que les heures vont passer. Il clignera rapidement de l’œil gauche en observant Jacques Bartel pendant que sa jambe battra follement la mesure.

Après avoir dit ce qu’il a dit, c’est à dire un début de phrase nostalgique débutant par un si, Jacques Bartel se tait. Ses yeux balaient l’espace. Arbitrairement cet espace a la taille et l’apparence d’une grande pièce claire et haute de plafond. Cette pièce est très désordonnée. Des livres et des revues sont empilés à même le sol. Si J.M. Pinas était psychiatre, on imaginerait son divan couvert de livres. S’il était avocat, on trouverait plusieurs grandes maquettes de très belle facture de bateaux anciens sur le sol, près d’une cheminée en marbre. C’est à peu près tout ce qu’il faut avoir en tête.

Quand il est lui-même, la voix de Jacques Bartel est chaude et puissante. Là, il parle bas et très vite. Il s’écoute penser plus que parler :

— Chaque automobiliste faisait partie d’un vaste ensemble qui devait bien finir et commencer quelque part. Mais je me demandais où.

— Vous êtes-vous vraiment posé cette question en ces termes à ce moment ?

— Sans doute pas. Vous avez raison. C’est avec le recul que j’ai cette idée en tête et seulement parce que je vous en parle. Rétrospectivement, je me dis que si j’avais pu me projeter vers le ciel pour pointer du doigt l’élément déclencheur qui marquait notre histoire commune d’embouteillés, j’aurais pu dire : voilà, c’est ici que naît le début, c’est ici que tout commence ; à cause de cet événement, peut-être insignifiant, des milliers de véhicules roulent au pas sous la pluie, nous sommes en retard et je vais devoir téléphoner à Max pour nous excuser parce que ma femme insiste. Mais si j’avais pu me détacher de mon corps pour observer la ville, j’aurais sûrement cherché une responsabilité humaine à notre immobilisation. Je me serais trompé. Nous étions bloqués à cause du fleuve et de la météo. Mais mon histoire ne commençait pas réellement dans cet embouteillage. Quand commence-t-elle ? Je ne parle pas de son origine mais du moment où elle a acquis son autonomie et s’est mise à devenir problématique pour moi. On se trompe tout le temps sur tout, non ? On croit des choses qui s’avèrent toujours fausses à la fin. On croit trop. Et je croyais aussi savoir ce que pensait ma femme, et la raison de son silence, j’étais sûr que je l’avais mise en rogne pour avoir pris les routes les plus encombrées, pour avoir fait de mauvais choix, et ne pas lui avoir demandé son avis, que c’était pour ça qu’elle se taisait, qu’on ne se disait rien depuis plus de deux heures. J’imaginais la conversation qui n’avait pas lieu, j’entendais sa voix, je lui répondais, nous nous énervions dans ma tête. C’est n’importe quoi.

— Vous savez, le début n’est qu’une notion très relative. La naissance n’est pas un début en soi, c’est plutôt le passage d’un état vers un autre état. Vous devriez réfléchir à cette idée d’état et de passage, et de changement. Le Tao dit que tout est mouvement.

Un moment de silence intervient entre les deux hommes. Ce blanc dans le monologue est à peine troublé par le bruit étouffé de la circulation. J.M. Pinas déplace légèrement le combiné de son téléphone pour ne pas être dérangé. Jacques Bartel s’agite sur son siège :

— Vous ne trouvez pas qu’il fait chaud, chez vous ?

— Non, je ne trouve pas.

— Vous croyez que j’ai perdu pied ?

— Si vous n’êtes pas chronologique, je ne pourrai pas répondre à cette question. Allez-y.

(la suite ? Sainte Rita priez pour nous)

20 mars 2006

Lettre de Refus Liana Levi

ldr_leviDDDélai de la réponse : 28 jours
DDCoût du retour du manuscrit : 3,70 €
DDDurée de la conservation du manuscrit : 15 jours
DDNuméro de référence : oui
DDSignature : oui
DDPersonnalisation : oui
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 10

  Cliquer sur la lettre pour l'agrandir

Qualité du papier : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toile_toile_toile_toilenoire

Impression générale : _toile_toile_toile_toile

Etat du manuscrit : non reçu

Commentaire : La mention spéciale, l'Eldorado en pièces détachées dans une lettre, le matin qui chante : Liana Levi merci ! Oui, il arrive à l'auteur de tiroir de s'enthousiasmer quand on lui dit non en lui expliquant la raison du refus (à l'image d'une fille qui vous dirait qu'elle ne veut pas coucher avec vous car elle n'aime pas vos petits doigts). Le début de la lettre n'effarouchera pas les plus aguerris de l'exercice. La suite surprendra tout le monde, y compris l'illustre Paul Auster. Deux lignes d'explication. Deux lignes, comme deux béquilles pour continuer son petit bonhomme de chemin (on the road again, boy). Le sourire aux lèvres, je retranscris :

Malgré ses qualités, c'est avec regret que nous vous annonçons que notre comité de lecture a décidé de ne pas le retenir. En effet, l'histoire est un peu trop compliquée, ce qui égare le lecteur, et le choix de Paul Auster comme personnage du roman est relativement dangereux.

Le 5ème arrondissement c'est autre chose que le 6ème, on sait parler aux gens ! (me voilà, à cause de deux lignes, partisan, chauvin, dénigrant, sarcastique et de mauvaise foi). Reprenons calmement. Le premier choc passé (je ne suis plus un simple numéro), j'analyse. J'égare "un peu" le lecteur et Paul Auster est un personnage "relativement" dangereux. Emporté dans mon émoi, je prends tout ça pour un compliment sans me demander pourquoi les lecteurs de proximité (famille et divers otages) n'ont pas trouvé l'histoire compliquée (m'ont-ils menti par peur de représailles ?). Le hic c'est que Corpus est intimement lié à l'oeuvre de Paul Auster et que si je me suis cassé la tête à faire perdre le nord au lecteur ce n'est pas pour lui refiler une pelote de fil d'ariane au chapitre 3. L'affaire est pliée, aucune réécriture n'est envisageable.

Bis repetitas, Liana Levi sait parler aux auteurs de tiroir. Jugez plutôt : néanmoins, nous souhaitons vivement que votre manuscrit trouve rapidement un bon accueil dans une autre maison d'édition et une place sur les tables des librairies (quasi malaise de l'auteur de tiroir survolté par cette image commerciale). Par ailleurs, si vous disposez d'autres manuscrits (j'en écrirai pour vos beaux yeux), n'hésitez pas à nous les envoyer, nous les lirons avec intérêt.

Cette lettre aura deux conséquences directes sur l'avenir du monde :

- je décide de contacter Paul Auster à Brooklyn (voir PAUL AUSTER)

- je décide d'écrire d'autres romans (au désespoir des éditeurs du 6ème exaspérés par de tels encouragements irresponsables)

Pour le plaisir : le mot "pilonné" en bas du P.S. file des frissons (mon manuscrit, mon cher et tendre enfant pilonné !!!)

Conclusion : Deux lignes d'explication ne valent pas une bonne fiche de lecture bien roborative, mais on en redemande une tartine. Même si les conseilleurs ne sont pas les payeurs, investir dans une police de caractères traditionnelle ne ferait pas de mal à l'image de la maison (message sponsorisés par Arial corps 11).

20 mars 2006

Lettre de refus Belfond

ldr_belfondDDDélai de la réponse : 17 jours
DDCoût du retour du manuscrit : gratuit et automatique
DDDurée de la conservation du manuscrit : -
DDNuméro de référence : non
DDSignature : non
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : non
DDNombre de lignes : 5

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Qualité du papier : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : non lu

Commentaire : La lettre de refus de Belfond habille la profession comme un jogging les fesses maigrichonnes de Karl Lagerfeld. Aucune tenue, aucun style, pas de signature, pas de références, pas de personnalisation. 5 lignes posées sur un papier manager on ne peut plus classique règlent la question. Les tenants ? Le manuscrit a été soumis au Comité de lecture (voir ANNE CARRIERE). Les aboutissants ? Malgré ses qualités, nous ne pouvons pas le retenir en vue d'une publication.

Qualités, qualités ?, est-ce que j'ai une gueule de qualités ?, mugira l'auteur de tiroir en ouvrant l'enveloppe de papier Kraft au fond de laquelle Belfond a consigné votre lourd manuscrit. L'éditeur n'est pas chiche car il vous renvoie votre bazar sans vous réclamer d'écot. C'est toujours 5 € d'économiser (qui vais-je harceler maintenant avec mon manuscrit ?). Le premier réflexe de l'auteur de tiroir recevant son manuscrit, consiste à l'examiner pour repérer des traces de manipulation des pages. Là, le verdict tombe salement : les pages sont aussi virginales qu'à la sortie de la boîte de photocopie où j'ai passé trois heures de ma vie à concevoir une vingtaine de clones de ce texte indésirable. C'est dégueulasse, s'emportent mes amis navrés. Ils ne t'ont même pas lu. Comme aurait pu l'écrire Jean d'Ormesson dans Au plaisir de Dieu (onanisme quand tu nous tiens) : z'en ont rien eu à branler.

S'agit-il encore d'une lettre type ? Belfond se tient à la lisière. Allez, prenons un risque fou : c'est du retour à l'expéditeur façon n'habite pas à l'adresse indiquée. Vae Victis.

Conclusion : doit embaucher un stagiaire qui froissera quelques pages du manuscrit pour créer l'illusion d'une manipulation. Vous n'imaginez pas les petits plaisirs d'un auteur de tiroir. Mon empire contre une pliure à la page 27 et une trace de bic dans la marge

20 mars 2006

Lettre de Refus Lattès

ldr_lattes1DDDélai de la réponse : 29 jours
DDCoût du retour du manuscrit : gratuit et automatique
DDDurée de la conservation du manuscrit : -
DDNuméro de référence : non
DDSignature : oui
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 6

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Qualité du papier : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : non lu

Commentaire : Jean-Claude est un brave gars au fond. Avec sa police de caractères immense, son refus crève les yeux sans grever le budget. Notre cher et précieux manuscrit nous est renvoyé gratis et vierge de toute manipulation (voir aussi BELFOND). Miracle du métier permettant au Comité de prononcer un avis sans manuscrit ouvrir (on va me reprocher d'être amer, il me faut mettre une touche de légèreté dans ma prochaine phrase). L'auteur de tiroir sera ravi de découvrir au bas de la lettre une vraie signature de qualité à l'encre bleue, impression inégalable qui ringardise les innombrables lettres paraphées au bic des confrères du 6ème (c'te honte !).

Je ne voudrais pas être accusé de complaisance avec Jean-Claude. Suit un mauvais point qui en d'autres cieux mériterait à lui seul le plastiquage du 17 rue Jacob. Comment peut-on continuer à se regarder le matin dans le miroir de sa sale de bain haussmanienne en écrivant aux refusés, affamés de signes, que leur texte est un projet et non un manuscrit. UN PROJET ?? Et pourquoi pas un brouillon d'émission de télé-réalité tracé sur un bout de set de table d'un Buffalo Grill de Province* (sur le verso du set car le recto est imprimé). Tout se perd...

* le terme de province est à prononcer d'un air dégoûté (merci)

Conclusion : lettre vite lue, vite oubliée. Shoot again, boy !

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20 mars 2006

Lettre de Denoël

ldr_ldenoelDDDélai de la réponse : 27 jours
DDCoût du retour du manuscrit : 6,09 €
DDDurée de la conservation du manuscrit : 1 mois
DDNuméro de référence : oui
DDSignature : non
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 5

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Qualité du papier : _toile_toile_toile_toilenoire

Argumentaire : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : pas encore reçu

Commentaire : DENOEL ne fait pas de cadeau (facile). C'est sobre, froid, terriblement efficace et cher (6,09 € le retour du manuscrit). Rien de neuf ici sous le ciel du refus. Le numéro de référence (J 5679) est impénétrable et l'intérêt de l'étude du manuscrit par le service littéraire n'est pas relayé par l'intérêt de l'auteur de tiroir toujours orphelin de sa fiche de lecture. Le novice pourra se faire peur le soir en relisant à haute voix la fin d'un PS plus long que le corps de la lettre : sans nouvelles de votre part dans un délai d'un mois, nous considérons que vous nous autorisez à le détruire (prendre l'accent soviétique 70th ou américain contemporain pour plus de réalisme)

Conclusion : le terme de frais de gestion paraît quand même usurpé quand il s'agit de coller un timbre sur une enveloppe et d'imprimer six lignes. Un peu de modération dans vos propos, que Diable !! (j'aime recourir à un ton docte à la fin de mes conclusions).

20 mars 2006

Lettre de Refus du Seuil

ldr_seuilDDDélai de la réponse : 33 jours
DDCoût du retour du manuscrit : 5 €
DDDurée de la conservation du manuscrit : 1 mois
DDNuméro de référence : oui
DDSignature : oui (paraphe)
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 16

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Qualité du papier : _toile_toile_toile_toilenoire

Argumentaire : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : pas encore reçu

Commentaire : Avec le Seuil, les auteurs de tiroir connaîtront cette petite décharge d'adrénaline à l'extirpation de la lettre de son enveloppe (sitôt suivie d'une petite mort). Cette lettre, c'est un pavé (dans la y-en-a-marre), une tirade (sur le pianiste sous word), que dis-je une tirade, c'est de la littérature ! Oui, madame, je reconnais avoir pensé que la longueur de la lettre présageait peut-être quelque chose de bon : un extrait de fiche de lecture, une demande de rendez-vous, une supplication à signer chez eux. Cette impression a duré ce qu'elle a duré (0,27 seconde) ; puis mes yeux ont sommairement balayé les seize lignes de la lettre et ont trouvé l'ordinaire des refusés : attentivement étudié, malheureusement, pas possible, après lecture. Et merde...

Revenu de mes enfantines émotions, je redeviens cet homme sérieux et moderne, fin analyste, épris d'objectivation, capable de trouver en lui des trésors d'abnégation compréhensive (tout ceci après avoir râlé, pesté et postillonné sur cette putain d'énième lettre de refus).

Analyse du numéro de référence : n° 2060478. Trituré en tout sens, je conclus que le 2 correspond au mois de février, que le 06 est un raccourci de l'année, et que Corpus est le 478ème manuscrit du millésime 2006. Incroyable comme une simple référence peut vous ramener à votre condition de mouton de panurge ou de piétaille à Louxor (voir GRASSET).

Le Seuil enchaîne sous des auspices mi-rassurants, mi-exaspérants. Ainsi l'étude a été attentive (une fiche de lecture ? Et puis encore, petit insolent ?! Pourquoi pas une réduction d'impôt de vos frais de photocopie ?). Mais il semble à l'éditeur qu'il ne soit pas le plus à même de le publier. Nous touchons là au sublime ! Si le reste de la profession argue pour se déresponsabiliser de l'afflux de manuscrits ou du grouillement d'auteurs sur son palier, le Seuil frappe plus haut et plus fort : un éditeur, quelque part, s'occupera mieux de votre texte que nous ne pourrions le faire. Des noms, des noms !!, supplie l'auteur de tiroir. Mais déjà le pompon est remonté sous le chapiteau du manège. Continuons à tourner encore un peu en rond et à payer un petit tour de plus (5 €, ceux-ci forfaitaires).

L'ésotérisme patiente au coin de la rue. Un mystère digne du Da Vinci Code entoure l'enveloppe de cette lettre de refus (voir copie ci-dessous). Que signifient ces deux chiffres "2" inscrits au stylo en haut et en bas de l'enveloppe. 2/20 ? Février ? Et que penser du choix de la marque de l'enveloppe (niceday). Provocation ? Cynisme ?

Conclusion : s'il est épais, le paillasson du Seuil n'en invite pas moins à aller se faire voir ailleurs

D

D

enveloppe

20 mars 2006

Lettre de Refus Anne Carrière

ldr_anne_carriere1DDDélai de la réponse : 20 jours
DDCoût du retour du manuscrit : 5 € - enveloppe "mousse"
DDDurée de la conservation du manuscrit : 2 mois
DDNuméro de référence : non
DDSignature : oui
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 11

  Cliquer sur la lettre pour l'agrandir

Qualité du papier : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toile_toile_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : pas encore reçu

Commentaire : De la lettre d’Anne Carrière s’échappe un parfum vieille France. On chuchote boulevard Saint-Germain et les mots de refus deviennent des compliments anesthésiant cette fureur qui devrait logiquement vous saisir dès la découverte de la première phrase ; sommet du raffinement lorsque l'on vous propose de vous renvoyer votre manuscrit dans une enveloppe « mousse » - pour 5 €. Vous prendrez bien un petit gâteau avec votre thé (Mariage Frères) avant de nous débarrasser le plancher ? C’est donc avec politesse et tact que l’on vous raconte n’importe quoi. Le "n’importe quoi" dans la lettre de refus pourrait sans mal se résumer en retranscrivant in extenso la première ligne d'Anne Carrière : "Notre Comité de lecture a examiné avec une grande attention votre manuscrit Corpus. Malheureusement...". A ce malheureusement de mauvais augure peut s'accoler une ribambelle de faux-frères se tenant par la main et chantonnant en choeur l'hymne Polnareffien de Nous irons tous aux Paradis (auteurs à succès et auteurs de tiroir). Deux faux-frères pour la route ?

1. malheureusement il ne peut s'intégrer dans notre programme éditorial (Anne Carrière)

2. malheureusement il nous a semblé que nous n'étions pas l'éditeur le plus à même de le publier (Le Seuil)

D'entrée de jeu, l'éditeur fait référence au fameux comité de lecture, ce cabinet noir rempli de molles sellettes capitonnées soie et d'inquisiteurs invisibles. Et la charge de la preuve ? C'est bien gentil d'évoquer un Comité et une lecture attentive mais NOUS (les auteurs de tiroir - mais surtout MOI, MOI, MOI) réclamons une preuve, nous voulons, nous exigeons une fiche de lecture (le nirvana inaccessible des refusés) fille naturelle de cette grande attention du Comité de lecture.

- J'existe ! Expliquez-moi. Dites-moi pourquoi vous n'avez pas aimé.

- Fais pas chier, mec. Tire-toi et file-nous tes 5 €.

Rien ne nous est épargné (quelle vie de chien).

D'un autre côté, est-ce vraiment la faute de l'éditeur, lui qui nous rappelle qu'il est obligé d'être très sélectif ? Comment recevoir ce terme de sélectif sans se sentir coupable et exclu à jamais de la République des Lettres. Comment comprendre cette obligation mise en avant ? Doit-on plaindre l'éditeur ? Dois-je avoir honte de l'importuner ? Suis-je un paria ?

Oublieux de l’impression laser couleur (1 couleur) et du décalage prononcé du corps de texte vers la marge gauche, nous retiendrons le doigté inimitable de cet éditeur au moment de la mise au rancart : le manuscrit ne sera pas détruit après deux mois mais Anne Carrière ne sera plus en mesure de le conserver. Etre exécuté par un bourreau distingué qui choisit ses mots, c'est pas si mal au fond (du trou).

Conclusion : très bonne éducation, difficile de se plaindre sans paraître grossier. Pour passer mes nerfs j'ouvre un roman de Beigbeder et je lis qu'il y a autant d'écrivains en France que de lecteurs (Vacances dans le coma).
- Trois Xanax bien serrés, please.

18 mars 2006

Lettre de Refus José Corti

ldr_corti1DDDélai de la réponse : 10 jours
DDCoût du retour du manuscrit : 5 €
DDDurée de la conservation du manuscrit : 2 mois
DDNuméro de référence : non
DDSignature : non
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : non
DDNombre de lignes : 8

  Cliquer sur la lettre pour l'agrandir

Qualité du papier : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : pas encore reçu

Commentaire :

Que dire ? Nous voici face à face avec LA lettre totale, le refus paroxystique dans toute sa grandeur. Appelons un chat un chat, et ce ne sont pas les tâches noires disséminées sur le papier qui nous contrediront, la lettre de refus de Corti est une photocopie de mauvaise qualité (2,85 € h.t. la ramette de 500 feuilles). Sale impression de laisser-aller dans le 6ème arrondissement.
Corti ne prend pas de gant avec les auteurs de tiroir. Sa hache est aiguisée. Votre texte n’a pas été retenu… là un court silence intervient, un intervalle nihiliste (je n’y crois pas) une pause dans la fureur du siècle, le temps pour l’auteur fraîchement décapité de se faire une allure de macchabée digne… et ne fera pas l’objet d’une seconde lecture. Bien, bien. Je bégaie, la répétition me donne une contenance. Le choc passé, je bondis sur le petit mot qui dépasse du rouleau compresseur : seconde lecture. Est-ce à dire qu’il y eut une première lecture dans un bureau quelconque ? Que Corpus a réellement été lu par un être humain ? Je ne me risquerai pas sur ce terrain. Non ! Je ne mange pas de ce pain là. Je joue l’indifférent. Même si j’ai ma petite idée, je préfère ne pas y penser. Feuilletage primesautier ou panier à trois points vers la corbeille, la première lecture est un fantasme hors de prix.

La seconde ligne vous enterre le bonhomme. Corti ou Grasset, même combat. A l’instar (déjà au collège j’utilisais ce mot et ne l’aimais pas) du pharaon derrière les talons poussiéreux de Moïse, Corti voit déferler la vague des manuscrits de tiroirs sur son petit bureau. Mazette ! Si Grasset esquive en se défaussant de tous ses avis circonstanciés (voir GRASSET) Corti nous assomme d’une lettre circulaire. Même désolé, le mot est lâché et il fait des ravages. Quoi ? Je n’ai même pas le droit à une lettre de refus. Me faudra-t-il dire à mes amis, sincèrement navrés pour moi, que j’ai reçu une circulaire de refus du 11 rue de Médicis ? Certes, Corti est une petite équipe mais quand même, ce ne sont pas des façons de traiter les gens qui mendient à votre porte une VRAIE lettre de refus. Si les regrets et les vœux de succès auprès des confrères de la rue d’à-côté closent la circulaire, une phrase se détache : sauf demande de votre part… nous détruirons votre manuscrit. La vache ! Corti ne fait pas dans la dentelle.

Conclusion : au piquet ! Punition : 1 stage de coaching en communication et du papier à en-tête.

18 mars 2006

Lettre de Refus des Editions de l'Olivier

ldr_olivier1DDDélai de la réponse : 11 jours
DDCoût du retour du manuscrit : enveloppe affranchie (je suis un esclave)
DDla maison n'accepte pas les chèques (échec, ta mère !)
DDDurée de la conservation du manuscrit : 1 mois
DDNuméro de référence : non
DDSignature : oui (paraphe)
DDPersonnalisation : non
DDMention du titre du manuscrit : oui
DDNombre de lignes : 6

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Qualité du papier : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Argumentaire : _toile_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Impression générale : _toilenoire_toilenoire_toilenoire_toilenoire

Etat du manuscrit : pas encore reçu

Commentaire : Remerciements et regrets d'usage. L'éditeur s'était précédemment fait remarquer de l'auteur de tiroir par une extraordinaire lettre de refus (une perle, un cas d'école, un grand éclat de rire généreusement partagé) où il reprenait quelques phrases extraites des nouvelles constituants le-dit recueil, phrases vis-à-vis desquelles il éprouvait une répulsion telle qu'il avait jugé indispensable des les retranscrire "à la main" au verso de sa lettre de refus histoire de décourager, peut-être, l'importun de revenir à la charge avec (horreur !!) un roman (monsieur, veuillez sur le champ arrêter de nous emmerder avec vos phrases imbéciles et vos mornes histoires, eût plus d'effet). Cette fois, l'auteur de tiroir se pourlèche avec le mot d'emblée à la ligne 3 : il (le manuscrit) ne s'inscrit pas d'emblée dans l'esprit, la recherche et le ton communs aux textes de littérature française (my god ! tout de suite les grands maux d'auteur) que publie l'Olivier.
Monsieur Larousse (édition 2000) est formel. L'éditeur ne lit pas les manuscrits puisque le mot d'emblée doit s'entendre : Emblée (D') : Du premier coup, dès le premier effort ; aussitôt, immédiatement.
Pour aberrante qu'elle paraisse, l'expression d'emblée semble bien apropriée au destin de Corpus chez cet éditeur : pas lu, next ! Remarquons pour finir que Corpus est tellement mauvais que seule la chance peut le sauver du tiroir. Amen.

Conclusion : les lettres de refus de cet éditeur valent à elles-seules d'écrire un roman. Tout est dit en 6 lignes sur le milieu confiné de l'édition : la chance comme planche de salut(-casse-toi), les manuscrits vite (ré)expédiés, une forme subtile  d'aide au découragement par une référence en creux et quasi religieuse à la Littérature Française. Bref, en écrivant je blasphème.

L'Olivier obtient un accessit au concours national de la lettre de refus la plus moche : papier atroce, logo mal photocopié, code postal incorrect et, le comble, paraphe au stylo bille. Où est passé le dandysme, bordel ??

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